Livre blanc 2GAP 2023 : Femmes, pouvoir et argent

L’association 2GAP (Gender and Governance Action Platform) a été créée en 2020 à l’initiative de réseaux professionnels féminins et mixtes des secteurs public et privé, dans une initiative unique permettant de porter le plaidoyer auprès du gouvernement mais aussi du monde économique et social afin de: « permettre à nos sociétés d’avancer plus rapidement vers cette égalité réelle que nous n’acceptons pas d’attendre encore plus longtemps« .

NB : membre de ce collectif depuis ses débuts, au titre du programme Women Empowerment CEDE- ESSEC, Viviane de Beaufort participe au plaidoyer en faveur de l’Egalité Femme/Homme de 2GAP, porté par plus de 50 réseaux fondateurs et associés à 2GAP, comme AlterEgales, MixCity le réseau de la BNPP ou encore Femmes Cheffes d’Entreprise ou la Fédération des Femmes Administratrices, mais aussi BPW

L’association a rédigé un livre blanc à l’occasion de la 2ème édition de ses Assises en 2023.

I – Le constat de 2GAP

« Femmes, pouvoir et argent, une trilogie audacieuse! ». De nombreux stéréotypes corrèlent en effet négativement ces notions selon le livre blanc de 2GAP. De nombreux stéréotypes qui, propagés dès le plus jeune âge, vont impacter plus tard la vie professionnelle des femmes : disparités de rémunération, accès au financement plus difficile, accès au pouvoir freiné (seulement 4,81% des entreprises mondiales par exemple ont une PDG femme en 2021).


Au-delà des stéréotypes de genre, les politiques d’égalité défaillantes ou insuffisantes sont également identifiées comme un facteur contribuant à ces inégalités. Dans une de ses études, Bearing Point identifie une grille permettant de séparer les entreprises en trois catégories :

  • Les entreprises « peu matures » : le sujet du genre est porté par les ressources humaines, mais est peu suivi à haut niveau.
  • Les entreprises « engagées » : celles-ci ont mis en place des politiques internes au sujet des inégalités de genre, et la politique est menée par un organe indépendant de la structure.
  • Les entreprises « inspirantes » : elles considèrent le genre comme un sujet impactant l’ensemble de leur chaine de valeur.

GRAIN DE SEL VDB : on ajoutera le rapport complexe des femmes à l’investissement largement évoqué dans le travail réalisé par Femmes Business Angels

2GAP souligne l’impact de la sous-représentation des femmes dans le monde professionnel. Le cabinet d’études McKinsey a par exemple démontré que plus la représentation de la diversité des genres dans une entreprise est élevée, plus la probabilité de surperformance est élevée. Il est donc vital pour une entreprise d’arriver à l’égalité de représentation et de rémunération des genres, mais aussi d’encourager le bien-être de leurs employées en essayant de trouver un équilibre bonheur/better life et survie, mais aussi en proposant de nouveaux indicateurs de mesure allant au-delà de l’aspect financier.

II – L’observatoire 2GAP

L’observatoire 2GAP utilisé pour la première fois dans le livre blanc de l’association, est un mécanisme de suivi annuel consacré aux progrès, difficultés, voire contournements éventuels de la mise en œuvre des dispositifs sur la parité et l’égalité salariale, dans le privé comme dans le public. L’objectif de l’observatoire ? « Produire une plus-value qualitative par rapport à ce qui pourra être produit par les entreprises et les pouvoirs publics. »

Dans le secteur privé

Des questions ont été posées aux entreprises pour évaluer leur investissement et leur application des lois sur l’égalité de genre:

  • L’aide qui peut être apportés par les réseaux féminins aux entreprises pour que celles-ci appliquent les lois sur l’égalité hommes/femmes (Copé-Zimmermann, Rixain)
  • La perception qu’ont les entreprises de l’application de ces lois
  • Comment rattraper les années d’écart salarial entre hommes et femmes

Pour appliquer les lois, trois axes d’actions ont été identifiés :

  • Recrutement
  • Accompagnement de la carrière des femmes
  • Conditions de succès

Quelques pistes sont également données pour améliorer la perception de ces lois : faire connaître la réalité des taux de féminisation dans les instances dirigeantes, promouvoir l’égalité professionnelle, intervenir dès le collège pour sensibiliser les plus jeunes à l’égalité hommes/femmes.

Au niveau des rémunérations, 2GAP souligne l’importance de créer des KPIs adaptés à la situation inégale telle qu’on la connaît aujourd’hui, comme par exemple le montant moyen des augmentations accordées aux femmes comparé à celui des augmentations accordées aux hommes tant au niveau global qu’au niveau individuel.

Dans le secteur public

Les questions portent sur le déséquilibre constaté dans la gouvernance publique et les cabinets ministériels, et des propositions pour rééquilibrer cette gouvernance publique.

En effet, les organigrammes genrés révèlent très visuellement le déséquilibre entre les deux sexes au sein des instances gouvernantes en France. Observons par exemple la répartition des responsabilités de haut niveau au Conseil d’Etat au 31 décembre 2022.

Au total, 31 hommes contre 21 femmes, avec une domination nette des hommes dans les postes à haute responsabilité.

Au sein des cabinets ministériels et malgré les nombreuses politiques publiques encourageant la parité, le constat est le même :


2GAP propose quelques pistes pour améliorer la parité au sein des institutions publiques :

  • Supprimer officiellement la pénalité lorsque “trop” de femmes sont nommées
  • Publier le taux de femmes promues aux différents grades par rapport aux promouvables
  • Fixer un objectif de 40% minimum pour les nominations équilibrées femmes-hommes sur le « stock » des postes occupés

III – Les solutions proposées pour 2023

Dans la troisième et dernière partie du livre blanc, 2GAP propose huit solutions concrètes pour 2023 et pour le futur, afin de viser une société totalement égalitaire, et plusieurs mesures par solution.

1) Renforcer les dispositifs de quotas sur tous les emplois de directions et cadres dirigeants

  • Etendre les nominations équilibrées
  • Accroître la transparence en publiant les chiffres sur l’embauche et la promotion des femmes

2) Améliorer l’index de l’égalité et l’appliquer au secteur public

  • Simplifier les règles de calcul des effectifs
  • Ajouter un indicateur sur le pourcentage de femmes présentes dans les instances dirigeantes.

3) Introduire l’égaconditionnalité dans la commande publique et dans les politiques de relance

  • Renforcer les exigences d’égalité pour la commande publique
  • Engager les structures publiques et privées à travailler sur un budget intégrant le genre

4) Adopter la budgétisation sensible au genre (BSG)

  • Acter dans une loi organique l’égalité femmes-hommes pour comme nouvelle règle d’or du budget
  • Poursuivre l’approche inter versants de la mise en oeuvre généralisée de la BSG

5) Investir davantage sur le leadership des femmes

  • Favoriser la création de réseaux professionnels féminins
  • Développer largement les formations sur le leadership et des programmes de mentorat

6) Lancer la mobilisation entrepreneuriale en faveur des femmes

  • Mesurer et évaluer les actions en place et leurs résultats, adapter les objectifs
  • Mettre en place des mesures d’incitation fiscale pour réorienter les financements des entreprises innovantes portées par des femmes

7) Favoriser la présence des femmes expertes dans les médias, les débats et les conseils et commissions des secteurs public et privé

  • Conditionner les aides publiques à la presse au respect de la parité dans les rédactions
  • Veiller à une représentation équilibrée femmes/hommes dans les médias en augmentant/renforçant le champ d’intervention du CSA

8) Renforcer la lutte contre le sexisme

  • Assurer l’égalité salariale à poste de travail et à valeur comparable
  • Renforcer la représentation des femmes et la lutte contre les stéréotypes dès l’école
  • Rendre effective la lutte contre les stéréotypes de genre au travail

Lire à ce sujet l’article du blog posté le 27 mars 2023 sur l’avancée de la mixité des boards en Europe